Depuis toujours, on polémique chaque année à Bruxelles sur quelques maigres pourcentages d’augmentation du budget européen. Mais le roi Coronavirus peut tout, puisque, en ce moment, on évoque un quasi doublement de ce budget.
Le programme conjoncturel européen de 750 Mrds €, proposé pour faire face aux conséquences de la crise actuelle, bénéficiera notamment à l’agriculture, avec 15 Mrds € qui doivent aller aux fonds de développement rural. Pour le budget agricole lui-même, les diminutions disparaissent et on augmente ainsi la partie développement rural qui devait être ponctionnée avant la pandémie.
Dans les propositions budgétaires pluriannuelles de la Commission européenne, l’agriculture serait dotée de 290,7 Mrds €. Pour les aides directes et les dépenses de marchés, 54,5 Mrds € de plus que dans le budget 2018 sont prévus, en prix courants ; pour le développement rural +5,44 Mrds € en prix courants ; auxquels s’ajoutent 16,4 Mrds € en prix courants du fonds Corona sous le titre « New Generation UE ».
Cela souligne clairement que ces subventions seront liées à des contraintes environnementales et climatiques pour tenir compte des générations qui auront à rembourser les dettes. Les fonds du développement rural doivent servir à aider les producteurs agricoles à remplir les objectifs de Farm to Fork Strategy (Stratégie de la ferme à la fourchette, le nouveau credo de la politique agricole européenne) et de la stratégie de diversité des espèces. Les propositions entrent maintenant dans les discussions avec les Etats membres et avec le Parlement européen. La Commission attend les décisions pour l‘automne 2020, afin que les fonds conjoncturels puissent être engagés.
C’est la procédure nouvelle qui devrait inquiéter l’agriculture. Les Etas sont priés d’intégrer sans délai les objectifs de Farm to Fork et de la diversité des espèces dans la réforme de la PAC. Habituellement une proposition de stratégie était suivie d’une proposition législative de la Commission et de discussions en conseils des ministres et au Parlement européen. Là on voit que des parties des deux stratégies devraient être intégrées dès la fin d’année dans la réforme de la PAC. On veut une sorte de « tandem » entre politique du climat, politique de diversité des espèces et politique agricole commune.
Autrement dit, il est clair que l’on ne va pas opérer des diminutions autoritaires de produits de traitements, ni mettre des terres en jachère écologique. Mais on va sans doute conditionner les paiements du Premier et du Second Pilier avec des objectifs à atteindre dans les deux stratégies, qui ne sont en fait que des énumérations de chiffres et de dates sans évaluation d’impacts sur l’agriculture. Les deux piliers seront donc à tonalité verte plus profonde l’un que l’autre, alors que dans toute l’agriculture européenne le débat est déjà maintenant entre d’un côté les revendications de plus de protection de l’environnement et de l’autre de moins de contraintes. AM