Ci-contre et de g.à dr. les ministres Svenja Schulze (SPD-Environnement), Anja Karliczek (CDU-Recherche), Julia Klöckner (CDU-Agriculture)
Le gouvernement allemand vient de décider d’un « paquet agricole », à présenter au Bundestag et qui a provoqué une levée de boucliers de la part de toutes les organisations politiques et professionnelles. Notamment du DBV – mais la CDU-CSU ne ménage pas non plus ses critiques. Il est vrai que ce «paquet toxique» comme dit le DBV, contient à peu près tous les points de friction actuels entre ministères d’une part et entre gouvernement et professionnels d’autre part.
Commençons par la réorientation de fonds du 1er pilier PAC au 2e pilier, qui passera de 4,5 % à 6 % en 2020, dernière année du programme budgétaire pluriannuel européen en cours. Il s’agira de 75 Mio €, soit 4,5 €/ha, et c’est plus que ce que Klöckner envisageait.
La ministre estime que 90 % de cette somme reviennent aux agriculteurs par un autre biais, et elle a obtenu en retour le soutien de la ministre SPD de l’Environnement, Sveja Schuklze, pour le label volontaire étatique de bien-être animal, label dont personne ne veut jusqu’à maintenant. Il devrait concerner tous les aliments d’origine animale et sera lié à des critères de production, de transport, et d’abattage dépassant les minima réglementaires, en commençant par les porcs.
Ces critères doivent encore être établis, en liaison avec le ministère de l’Environnement. Le gouvernement affirme par la voix de Julia Klöckner qu’il fera tout pour obtenir un label obligatoire européen. D’où les accusations de marchandage à petit prix : 6 % de redistribution d’aides directes contre le soutien au label, mais avec droit de regard de l’environnement sur les critères.
Pour le programme de protection des insectes, émanant du ministère de l’Environnement, c’est pire. Les objectifs et mesures restant à fixer seront obligatoires. Ce programme sera doté d’un crédit annuel de 100 Mio € dont 50 Mio € à prendre sur le GAK, le Fonds commun entre l’Etat et les Länder pour le financement des structures agricoles et la protection côtière.
Mais dans le cadre de ce programme, on a inscrit sournoisement l’annonce de la fin du glyphosate pour 2023, glyphosate que Klöckner veut considérer comme « un cheval politiquement mort ». En attendant une série de cas d’interdictions partielles sont annoncés : jardiniers amateurs, parcs public, zones protégées, dessiccations avant récoltes, etc…
Avant qu’on arrive au Bundestag, les prises de position vont jaillir de partout car rares sont les textes qui en sortent comme ils y sont entrés.
- D’ores et déjà, pour le DBV, ce paquet n’est « en aucun cas acceptable », il est « toxique » pour les agriculteurs, son contenu est une totale fausse-route du point de vue de la politique agricole. Il pèsera sur la compétitivité des exploitations. Un label Tierwohl de ce type ne sera pas admis sur les marchés. Le deal entre Klöckner et Schulze est toxique pour l’agriculture, l’environnement, et la santé.
- Greenpeace considère qu’un label volontaire est superflu et demande une décision européenne obligatoire sur le bien-être animal. Pour la redistribution des crédits PAC, il faut aller jusqu’à 15 %, maximum autorisé par la Commission européenne.
- La fraction parlementaire SPD ne veut pas suivre le gouvernement, et n’acceptera qu’un label obligatoire. Ces parlementaires ne veulent pas participer à une « politique nombriliste » de Julia Klöckner.
- La fraction des parlementaires CDU-CSU réagit elle aussi fortement, en réaction aux concessions faites au ministère de l’Environnement et au SPD. Les députés sociaux-démocrates veulent déficeler ce paquet et revoir totalement sa composition.
- Dans l’industrie agri-agro, on dit ne pas vouloir participer à cette « agitation de symboles ». Quant au glyphosate, estime-t-on, la décision ne pourra être qu’européenne, et elle devra impérativement être prise « sur des bases scientifiques ».
- Dernière minute : dans un premier débat au Bundestag, ce « paquet toxique » a effectivement été mis en pièces par la CDU/CSU. AM